Le 17 juin 2017, la corrida d’Aire-sur-l’Adour, dans le sud-ouest de la France, vire au drame. Iván Fandiño, matador respecté et admiré, affronte son destin au cœur de l’arène. Ce jour-là, sa carrière et sa vie s’achèvent brutalement, sous les yeux d’un public médusé. Ses derniers mots, prononcés entre deux souffles, résonnent encore comme une prophétie.
Une chute fatale au milieu de l’arène
Tout commence comme une corrida classique. Fandiño, 36 ans, enchaîne ses passes avec assurance. Originaire du Pays basque espagnol, père de famille, il s’est forgé une réputation d’audace. Sa spécialité : affronter des taureaux jugés trop dangereux par d’autres toreros.
Ce jour-là, le danger porte un nom : Provechito. Alors que Fandiño exécute une série de passes appelées chicuelinas, sa cape s’emmêle. Il trébuche. Le taureau en profite, se retourne et encorne le torero en pleine poitrine. Le choc est violent. La corne transperce ses poumons et son estomac.
Projeté au sol, traîné quelques mètres, il tente de résister. Les assistants se précipitent. Le public, lui, reste figé dans un silence effrayant. Le temps s’arrête.
Pendant qu’on l’évacue, le sang s’écoule sans répit. Fandiño lutte pour respirer. Ses paroles tombent comme des coups de couteau dans l’air déjà lourd : « Dépêchez-vous, je suis en train de mourir. » Selon son collègue Thomas Dufau, il ajoute : « Je sens que mon corps s’en va. »
À lireCovid-19 et vaccins : entre progrès scientifique et inquiétudes persistantesCes phrases, simples mais glaçantes, traduisent une lucidité rare dans un tel moment. Les spectateurs comprennent aussitôt : la blessure est fatale. Transporté à l’hôpital de Mont-de-Marsan, il subit deux arrêts cardiaques. Les médecins tentent de le sauver. Mais à son arrivée, il est trop tard. Iván Fandiño meurt à seulement 36 ans.
Une lettre prémonitoire et un débat relancé
Le drame ne s’arrête pas là. Après sa mort, une lettre troublante est retrouvée chez lui. Dans ce message intime adressé à sa famille, il écrit : « Sûrement, si vous lisez ceci, tout sera fini… Probablement, le prix que j’ai dû payer est trop dur, mais mon âme est tranquille… Demain n’est garanti pour personne. »
Des mots presque prophétiques, qui montrent à quel point le matador avait conscience du risque permanent lié à son métier. Il savait qu’un pas de travers pouvait signer la fin. Pourtant, il avait choisi d’affronter cette menace, jour après jour, animé par une passion viscérale.
Sa disparition déclenche une vague d’émotion. En Espagne, le roi Felipe VI salue « une grande figure de la tauromachie ». Le Premier ministre Mariano Rajoy exprime publiquement sa tristesse. Dans le monde de la corrida, l’hommage est unanime.
Mais cette tragédie ravive un débat explosif. Pour certains, la tauromachie incarne un art noble, un héritage culturel indissociable de l’identité espagnole et du sud de la France. Pour d’autres, elle n’est qu’une pratique cruelle, où l’homme et l’animal subissent la violence d’un rituel sanglant.
À lireRetraités et impôts : 2026 s’annonce comme une année décisiveLes images du matador agonisant dans le sable, empalé par un taureau, ont fait le tour du monde. Elles relancent une question brûlante : jusqu’où faut-il aller pour maintenir une tradition qui tue ?
La mort d’Iván Fandiño reste gravée comme l’un des drames les plus marquants de la tauromachie contemporaine. Ses derniers mots, sa lettre prémonitoire et son destin brisé rappellent la frontière fragile entre gloire et tragédie. Mais ils posent aussi un dilemme : faut-il préserver coûte que coûte une tradition au prix de vies humaines et animales ?